Le monde lapin est en deuil

Tous les lapins, lapinophiles et lapinolâtres de la planète sont en deuil suite au décès de Richard Adams, romancier anglais mondialement connu pour son œuvre magistrale Watership Down (tout de même un million d’exemplaires vendus dans le monde), traduit en Français sous le titre Les Garennes de Watership Down, et qui vient d’être réédité dans une traduction nouvelle sous le titre Watership Down avec une très belle couverture (combien comporte-t-elle de lapins ?) chez un éditeur improbable Monsieur Toussaint Louverture.

Une bonne occasion pour lire (ou relire) cette pépite, de préférence dans la langue de Shakespeare (ça ne peut pas faire de mal), et une bise à celle qui me dit qui est Toussaint Louverture.

Un roman pour se détendre

Il y a déjà un certain temps, j’ai parlé des deux premiers tomes de la série de Bertram Guthrie, intitulée The Big Sky (c’est ici). Le dernier tome est maintenant paru, sous le titre Dans un si beau pays, toujours aux éditions Actes Sud et dans une collection dont le nom décidément ridicule (L’ouest, le vrai) cache d’excellents ouvrages.

Dans un si beau pays

C’est la conclusion logique de la trilogie, où l’on retrouve le personnage de Summers vieillissant dans un pays qu’il a passionnément aimé mais dont les changements brutaux et rapides le mettent inéluctablement en marge. Excellemment écrit et très bien traduit.

Une BD pour les physiciens

Si vous avez la flemme de lire du sérieux pendant les vacances, vous pouvez sûrement lire une bande-dessinée. Alors autant qu’elle ne soit pas totalement idiote (genre mal dessinée avec un scénario indigent et dans une vignette sur deux des nanas à moitié à poil avec une poitrine ridicule à force de ressembler à des ogives thermonucléaires), et pourquoi pas carrément intéressante. D’abord, ôtez-vous de l’idée que quand c’est intéressant c’est nécessairement ennuyeux, ensuite, faites-vous à l’idée que même un physicien peut avoir une vie trépidante. Le physicien en question est peu connu des étudiants qui débutent car ses travaux les plus célèbres sont très techniques, mais il est en fait une personnalité hors du commun : il a participé au projet Manhattan (mise au point de la bombe atomique), a été professeur d’université à 24 ans, a reçu le prix Nobel de physique, a conçu et donné un cours niveau première et deuxième années d’université absolument extraordinaire (un pédagogue hors-pair !) et a fait partie de commission d’enquête sur l’accident de navette spatiale Challenger. Sa vie est un vrai roman, décrit avec humour dans Feyman de Ottaviani et Myrick publié chez Vuibert.

Un livre sur le nucléaire

Le nucléaire étant, qu’on le veuille ou non, une réalité de notre pays, il est assez raisonnable de s’informer sur le sujet, et à tant faire, de commencer par lire des livres écrits par des spécialistes du sujet, autrement dit des scientifiques et des ingénieurs. Celui que je vous conseille a l’avantage d’être rédigé explicitement pour un public non scientifique, mais prêt à prendre le temps de lire soigneusement pour comprendre (ce n’est pas un ouvrage de vulgarisation bas de gamme). Il est édité par EDP-sciences dans une excellente collection intitulé Une introduction à… qui comporte plusieurs autres titres potentiellement intéressants (mais à mon avis nettement plus durs pour des premières années de BCPST). Il s’agit de Le nucléaire expliqué par des physiciens sous la direction de Bernard Bonin et disponible ici pour la somme de 30 euros.

Le nucléaire expliqué par des physiciens  - EDP Sciences

Le livre est divisé en 6 grandes parties.
– Une introduction à la radioactivité, qui ne devrait pas apprendre grand’chose à des étudiants ayant sérieusement appris leur cours.
– Un panorama de la radioactivité dans l’environnement et le vivant, qui présente les différentes sources de radioactivité naturelles et artificielles, et qui explique comment on évalue les risques liés à l’irradiation, ce qui est loin d’être un problème simple.
– Une grande partie sur le fonctionnement d’un réacteur nucléaire, qui se clôt par la présentation des trois accidents nucléaires majeurs : Three Miles Island, Tchernobyl et Fukushima, avec pour ce dernier accident des informations qu’il est nécessaire de compléter (le livre est paru moins d’un an après la catastrophe de Fukushima).
– Un grande partie sur le « cycle de l’uranium », de son extraction à son exploitation dans la centrale puis au traitement du combustible usé (avec une présentation surtout axée sur la filière française qui organise le recyclage d’une partie du combustible), et qui se termine par les options de stockage des déchets ultimes.
– Une courte partie sur la place du nucléaire dans la production d’énergie, qui est elle aussi un peu obsolète puisque des pays comme l’Allemagne ont totalement révisé leur politique nucléaire depuis. la parution du livre.
– Une courte partie sur le futur du nucléaire avec une présentation des recherches en cours sur les réacteurs de troisième et de quatrième générations.

L’ensemble est d’un très bon niveau, précis et factuel. Ne nous en cachons pas, les auteurs sont partie prenante de la mise en œuvre du nucléaire en France, et leur opinion personnelle est que la filière nucléaire est mature et fiable, et que le nucléaire a de l’avenir. Cela transparait dans le texte, surtout dans les conclusions tirées, mais cela n’enlève rien à l’intérêt du livre : on peut s’informer sur la façon dont fonctionne un réacteur sans pour autant être d’accord avec la conclusion du paragraphe comme quoi c’est très fiable, ou s’informer des options qui ont été envisagées pour le stockage des déchets sans pour autant être d’accord avec celle qui a été retenue.

Il est bien entendu tout à fait autorisé de ne pas être d’accord avec l’opinion que le nucléaire est une filière d’avenir, et il est même recommandé de s’informer chez la concurrence. Tous les scientifiques ne sont d’ailleurs pas d’accord sur l’avenir du nucléaire, loin s’en faut, et des physiciens de tout premier plan militent pour une sortie du nucléaire. Cela n’est pas une raison pour ne pas s’informer sur ce qu’est le nucléaire et la façon dont il est géré en France car, comme je le disais au début, qu’on le veuille ou non, le nucléaire fait partie de notre environnement (la centrale de Nogent sur Seine est à environ 100 km de Paris et il va bien falloir faire quelque chose des déchets nucléaires). L’aspect scientifique et technique est un préalable indispensable pour se forger une opinion, qui doit être complété par des débats sur les aspects éthiques, sociaux, économiques, environnementaux ou médicaux.

A l’heure actuelle, il est probable que les énergies renouvelables soient presque mûres pour prendre le relais des énergies non renouvelables (dont fait partie le nucléaire), ce qui n’était pas le cas il y a encore 20 ans. Mais pour le moment elles ne sont pas tout à fait mûres. L’Allemagne a décidé de sortir immédiatement du nucléaire et a remis en marche des centrales à charbon, qui constituent les plus gros émetteurs de métaux lourds dans l’atmosphère (mercure en particulier) sans compter l’émission de gaz à effet de serre ; la France a décidé de prolonger la vie des centrales qui étaient prévues pour être démantelées dans les années qui viennent. Ces choix politiques doivent faire l’objet d’un débat et être en définitive du ressort des électeurs. Les énergies renouvelables sont séduisantes à bien des aspects, mais pour l’instant on manque de recul. Certaines études suggèrent que le régime des vents est modifié par les champs d’éoliennes, et la fabrication des panneaux solaires nécessite pour l’instant des minéraux plutôt rares donc des activités minières importantes et polluantes. Comme pour le nucléaire, une phase de maturation est nécessaire pour parvenir à sélectionner les meilleures options.

Un récit documentaire pas drôle

Je vous recommande ce récit documentaire, pas rigolo du tout (mais court) de Takiji Kobayashi, un journaliste et écrivain japonais d’entre les deux guerres : Le bateau-usine aux éditions Allia.

Le Bateau-usine

On peut ne pas forcément apprécier l’engagement de Kobayashi, un des derniers membre du parti communiste japonais, avant que celui-ci soit interdit dans les années 1930 et ses membres ne soient au choix : repentis et redevenus fidèle à l’empereur ou assassinés par le pouvoir (c’est cette dernière option pour ce qui concerne Kobayashi). Cet engagement transparait évidemment quelque peu dans le livre, mais pas plus que ça.

L’histoire raconte un épisode peu connu de l’histoire japonaise, et qui fait suite à la victoire du Japon sur la Russie en 1905. Le Japon a alors étendu son influence sur les îles au nord de l’archipel (qui seront reprises par l’Union Soviétique en 1945). Entre les deux guerres, il s’est déroulé une véritable guerre économique entre le Japon et l’URSS, le Japon ayant reconverti les navires de guerre pris aux russes en 1905 en bateau de pêche industrielle, chargés de piller les ressources marines (crabe en particulier) dans les eaux territoriales soviétiques. Les travailleurs de ces navires-usines étaient recrutés selon des contrats douteux et peu reluisants, et leurs conditions de travail plus qu’inadmissibles.

Ce n’est pas long, mais bien suffisant pour être convaincu qu’on vit quand même mieux aujourd’hui et ici.

Deux romans pour se détendre

Voilà bien longtemps que je n’ai embêté personne avec mes lectures. Pourtant j’ai réussi à lire quelques livres chouettes cet hiver.

Les éditions Actes Sud ont eu l’excellente idée de lancer une collection intitulée (un peu ridiculement d’ailleurs) L’ouest, le vrai (c’est mieux que de dire que c’est des histoires d’hommes, des vrais, mais c’est quand même ça l’idée). Donc, dans cette collection, on peut trouver les deux premiers tomes d’une trilogie apparemment célèbre aux Etats-Unis écrite par Alfred Bertram Guthrie : The Big Sky. Les parents de Guthrie ont participé à la conquête de l’ouest au debut du 20ème siècle, pas dans les premiers temps donc mais à une époque où le centre des Etats-Unis était encore relativement sauvage. Ses récits contiennent donc des informations de première main sur ce qu’a pu être la vie des premiers colons du côté des Montagnes Rocheuses.

Le premier tome, La captive aux yeux clairs (dont une partie a été portée au cinéma sous ce même nom) raconte l’histoire d’un tout jeune homme qui quitte le foyer paternel peu accueillant et s’engage dans une expédition (dirigée par un commerçant Français) consistant à remonter le Missouri en bateau pour essayer d’implanter des comptoirs. Afin de se protéger des Indiens (pas encore tous exterminés à cette époque, on est dans les années 1830), l’expédition détient la fille d’un chef Indien (belle comme il se doit). L’expédition est guidée par un trappeur, Dick Summers, qui sillonne le pays depuis 30 ans et le connait comme sa poche.

Le second tome, La Route de l’Ouest, raconte la traversée des Montagnes Rocheuses de la ville d’Independance (état du Missouri) jusqu’à Portland (dans l’Oregon donc sur la côte du Pacifique) par un convoi de colons guidé par le même Dick Summers, environ 10 ans après le tome précédent.

Outre que les histoires sont bien ficelées, ces deux livres sont très évocateurs de ce qu’a pu être ce pays avant la colonisation : des espaces quasiment infinis, presqu’intouchés et quasiment sans personne, même si, déjà en 1830 les trappeurs étaient frappés de la diminution drastique du gibier (en particulier les castors chassés pour les peaux).

Un très bon moment de lecture, et vivement la sortie du tome 3.

La Captive aux yeux clairs          La Route de l'Ouest

De la lecture en Anglais pour les vacances

Comme tous les ans, je signale à mes chers petits l’existence du site de l’université de Yale (donc pas tout à fait le premier site venu) consacré à l’environnement. On peut y voir des vidéo ou lire des articles en Anglais sur de multiples thèmes consacrés à la planète. Les derniers articles sont sur : la fermeture des centrales au charbon en Allemagne, la sécheresse en Californie, les causes des inondations en Inde, les projets pour construire un complexe hôtelier sur une des dernière île vierge des Caraïbes.

C’est vraiment passionnant et accessible en permanence à partir du bandeau à droite sur ce site : https://e360.yale.edu

Programme de lettres 2015 – 2016

Le programme de lettres paru officiellement en juin a pour thème :

Le monde des passions

Avec un thème pareil, on aurait pu s’attendre à des oeuvres un peu hardies (pour ne pas dire olé-olé), mais il n’en est rien. Au menu donc, et comme chaque année, un roman, une pièce de théâtre et un essai, donc un livre étranger. Les deux premiers sont disponibles pour pas chers dans la collection folio de Gallimard ou chez Garnier-Flammarion.

– Un roman absolument passionnant (c’est un peu facile, mais tellement tentant) : La cousine Bette de Balzac. Aucun souvenir, pourtant je l’ai lu …

Book

– Une excellent pièce de théâtre (et pour ceux qui ne sont pas sensibles à la langue, les pauvres ! au moins c’est court) : Andromaque de Racine.

Book

– L’essai est de David Hume : Dissertation sur les passions dans la traduction de Jean-Pierre Cléro.

Book

Pour les futurs étudiants de la BCPST du lycée Fénelon, il est indispensable d’avoir lu et de préférence un peu assimilé ces trois livres AVANT la rentrée, car ce n’est pas pendant l’année que vous aurez beaucoup le temps de lire, et si vous le faites (ce que je vous souhaite), ce sera sûrement pour vous détendre plus que pour travailler.

La mission Philae et les inévitables ovni

Il y a des gens assez cinglés pour avoir imaginé un jour (il y a quand même pas mal d’années maintenant) qu’on pourrait envoyer un appareil pour aller se poser sur une comète. Et en plus, ils ont réussi à convaincre qui il fallait de débourser la (modique) somme de 1 milliard d’euros pour y arriver.

Aujourd’hui que la sonde Rosetta est en orbite autour de la comète Machin-Chouette et que le module Philae s’y est posé, il faut se rendre à l’évidence : il y a des cinglés qui ont de d’envergure. En revanche, il y a d’autres qui sont juste cinglés.

En effet, malgré les extraordinaires photos visibles sur le site du CNES et les scoops sur l’odeur méphitique (la preuve par un magnifique spectre de masse) que doivent supporter les habitants (à ma connaissance, un seul connu : le Petit Prince

Le Petit Prince : Saint-Exupéry, Antoine de

qui habite bien sur une comète … mais à part ça c’est pas la peine de lire le livre, qui est quand même un peu faible),

malgré les données qui s’accumulent, disai-je, les comploto-ovniologues n’ont pas tardé à faire toute la lumière sur cette triste machination. Comme le relate cet article du Guardian (en Anglais), il est « prouvé » de façon irréfutable par certains que cet astéroïde est en fait un vaisseau extraterrestre. Il faut reconnaitre que leur vaisseau a une forme un peu bizarre, mais bon hein, on peut pas s’attendre à ce que les extraterrestres aient le goût de la symétrie (c’est quand même pas des gens de chez nous). Et d’ailleurs il est « prouvé » qu’ils ont déjà essayé de « communiquer » avec nous. Mais comme on nous cache tout on nous dit rien, les autorités ne nous ont pas encore dit si le message envoyé est rassurant ou menaçant (ce qui est quand même gênant tant qu’on n’est pas fixés sur la question de savoir s’ils ont ou non le rayon de la mort). Enfin, c’est quand même rassurant de penser qu’on aura bientôt la réponse à cette interrogation maintenant ancienne : est-ce que c’est bien eux qui ont construit les pyramides d’Egypte ? Je suggère, histoire de n’oublier personne, qu’on envisage un peu sérieusement la présence du Yéti à bord, parce que ça fait longtemps qu’on n’a pas entendu parler de lui.

Bref, ne nous laissons pas gâcher le plaisir de voir une comète comme si on y était, par des rabats-joie qui ne peuvent pas s’émerveiller en toute simplicité qu’on soit capable de faire des trucs aussi fous.