Sortie botanique du 28 juin : sur place

Sur place, nous serons (enfin, vous serez) là pour herboriser. C’est l’activité favorite de Monsieur Anselme, vous en avez de la chance !

Herboriser nécessite plusieurs choses :
– un crayon,
– un carnet,
– de l’attention,
– un petit fascicule que Monsieur Anselme vous fera distribuer (je pense).

Herboriser est plus confortable si :
– on a des chaussures adaptées à une journée de marche (quelques kilomètres quand même, avec une marche finale assez fastidieuse),
– on a un pantalon permettant de s’assoir dans les orties,
– on prévoit des tenues adaptées (il y a le droit de consulter la météo la veille),
– on a de quoi boire en quantité suffisante,
– on a des petites douceurs pour le 10h et pour le 4h,
– pour ceux qui sont allergiques aux piqûres d’insecte, prenez vos antihistaminiques, on sait jamais.

La sortie sera parfaite si :
– vous organisez un super pique-nique,
– vous faites des super-gâteaux,
– vous faites quelques photos souvenirs.

Sortie botanique du mardi 28 juin : le voyage

La sortie botanique aura lieu mardi 28 juin à Saint-Rémy-les-Chevreuses. Le rendez-vous est à 9h30 devant la gare RER de Saint-Rémy-les-Chevreuses.

En pratique, c’est le terminus de la ligne B du RER. J’attire l’attention de ceux qui n’ont pas l’habitude du RER que tous les RER ne vont pas au même endroit, sans compter qu’il y en a qui vont au sud et d’autres au nord.

Vous devez vous trouver sur le quai correspondant aux destinations « Robinson / Saint-Rémy-les-Chevreuses », et prendre un RER dont le nom commence par la lettre P. Une rapide consultation des horaires de la RATP donne les possibilités suivantes :
– un RER du nom de POUR, partant de Chatelet – Les Halles à 7h59, passant par St-Michel – Notre-Dame à 8h01 et arrivant à St-Rémy-les-Chevreuses à 8h45 (pour les stressés qui ont peur d’arriver en retard),
– deux RER du nom de PLAN, partant de Chatelet à 8h11 et 8h26 respectivement et arrivant à St-Rémy à 9h00 et 9h13 sont absolument parfaits et permettent de trouver la boulangerie avant le départ de la promenade,
– un RER du nom de PLAN, partant de Chatelet à 8h41 et arrivant à St-Rémy à 9h28 est un peu juste mais encore tolérable,
– le RER suivant du nom de PLAN part de Chatelet à 8h58 et arrive à St-Rémy avec déjà 15 minutes de retard, ce qui entraine automatiquement une division par 2 de la première note de SVT avec Monsieur Anselme.

Toujours pour ceux qui n’ont jamais pris le RER, il y a sur le quai des panneaux lumineux qui donnent tout à la fois le nom du train et l’ensemble des gares auxquelles il s’arrête. Attention, en cas d’incertitude, c’est le nom écrit sur l’avant du train qui fait généralement foi. En outre, aux endroits stratégiques, le conducteur informe généralement de la destination finale du train. Restez à l’écoute. C’est encore mieux si vous y allez avec un vieux routier des transports parisiens : moins de stress, rien à penser, et en cas de problème, ce sera de sa faute.

Je vous conseille également d’acheter en même temps votre billet aller et votre billet retour, et je vous invite à conserver votre billet jusqu’à la sortie. Il y a des contrôleurs même dans les lointaines banlieues.

 

L’essai et le roman du mois de juin

Je profite des quelques jours de tranquillité qui me restent avant l’irruption du Spectre des Nuits Courtes pour reprendre la trop longtemps interrompue chronique littéraire (j’ai des excuses : les grossesses fatiguent beaucoup les papas).

Je vous propose donc, puisque vous allez avoir plein de temps, un gros essai accompagné d’un court roman, tous les deux sur le thème de Byzance.

L’essai est écrit non pas par un historien, mais par un spécialiste de stratégie et de géopolitique, du nom de Edward Luttwak : La grande stratégie de l’Empire Byzantin, publié chez Odile Jacob. L’empire Byzantin, issu de la partition de l’Empire Romain en 395 à la mort de l’empereur Theodose, a survécu jusqu’en 1453, c’est-à-dire près de 1000 ans de plus que l’Empire Romain d’Occident (disparu en 476). Or, la situation stratégique de l’Empire Byzantin était nettement plus défavorable que celle de l’Empire Romain d’Occident, du fait de sa forme (un croissant autour de la Méditerranée, allant de la Grèce à la Libye) et de la très grande longueur de ses interminables frontières : au nord le long du Danube avec les menaces permanentes des peuples semi-nomades dont les Huns sont les plus célèbres, à l’Est en Mésopotamie avec l’ennemi héréditaire qu’était l’empire perse des Sassanides, et au sud plus tard celle d’où viendrait la menace Arabe.
Luttwak ne fait donc pas l’histoire de l’Empire Byzantin (c’est d’ailleurs parfois un peu frustrant quand on la connait mal, car il ne prend pas la peine de refaire ne serait-ce qu’une chronologie sommaire des principaux événéments avec des cartes circonstanciées), mais il élabore une théorie très convaincante expliquant la longévité de cet empire si fragile : c’est une stratégie élaborée sur le long terme qui a permis la survivance de l’empire. En effet, très tôt, les Byzantins ont choisi de rompre avec la politique de la force brute menée usuellement par les Romains, pour préférer la politique de la diplomatie subtile : recherche d’alliances stratégiques, espionnage à grande échelle, retournement de ses ennemis les uns contre les autres, adaptation des forces armées aux menaces nouvelles, achat sans vergogne de la paix à coup de lingots d’or, etc.
Ce livre est passionnant parce qu’il permet de comprendre que les événéments historiques ne surviennent pas mystérieusement, mais ont des causes très concrètes voire terre à terre. Un seul exemple, celui de l’avancée inéluctable des Huns, qui m’a toujours paru un mystère absolu. Or, c’est tout simplement la conséquence du fait que les Huns sont arrivés avec un arme d’une efficacité inégalée en Occident, l’arc composite réflexe, qui était d’une puissance de tir telle qu’il permettait de transpercer les boucliers romains tout en restant hors de portée des arcs romains. Ajouté à une cavalerie hors pair, cette arme rendait les Huns littéralement invincibles. De même, et contrairement à la théorie d’une école historique qui est maintenant un peu dépassée, Luttwak montre que les victoires et les défaites sont aussi la conséquence de choix tactiques bien humains : l’orgueil d’un général qui l’entraine à une manoeuvre désastreuse ou au contraire son habilité ou sa hardiesse qui le mène à la victoire.
Bref, c’est un livre qui ne se présente pas comme un livre d’histoire, mais qui en est un complément captivant. Un seul regret : comme tous les livres écrits par des Américains, il est fouilli et le plan laisse à désirer, si bien qu’on a parfois l’impression d’un manque de structuration.

 

Le roman est beaucoup plus léger, tant par le volume que par le contenu, et je ne l’ai choisi que pour son intrigue byzantine. Il s’agit de Les temps parallèles de Robert Silverberg, prolifique auteur de science-fiction et incontestablement l’un de ceux qui ont lancé le plus d’idées originales maintes fois copiées par d’autres. Cet ouvrage est loin d’être son meilleur, on peut même dire que c’est de la SF certes assez bien ficelée mais qui ne mérite pas qu’on s’y attarde plus d’une soirée. Dans un futur pas si lointain, on propose aux touristes des voyages temporels dans divers lieux et à diverses époques. Le héros, spécialiste de l’histoire byzantine, devient accomagnateur de voyages dans l’Empire Byzantin. Il montre aux touristes les événements les plus marquants et (touristes débiles oblige) les plus people : le siège de Constantinople par les Bulgares, l’impératrice Théodora célèbre pour sa nymphomanie, l’inauguration de la basilique Sainte Sophie, etc. Tout se grippe lorsqu’il tombe amoureux d’une de ses lointaines ancêtres, fille d’une grande famille byzantine. L’intrigue est assez légère, mais Silverberg a cela de bon qu’il est soigneux dans la gestion des paradoxes temporels. Par exemple, à force d’envoyer des touristes voir les principaux événements, il finit par y avoir plus de touristes que d’autochtones autour de Sainte Sophie le jour de son inauguration, ce qui pose des problèmes aux organisateurs. Je parlerai un autre jour de livres un peu plus achevés et sérieux de Silverberg.

Heureux événement et conséquences fâcheuses

Mes chers petit-e-s, je suis heureux de vous annoncer la naissance de la dernière des lapines, qui répond au nom (très chic et délicieusement suranné) de Mathilde. Elle est, à ce stade, laide comme les 7 péchés capitaux, mais usuellement, cela n’est que temporaire.

Je ne sais pas pourquoi, je n’ai pas du tout l’intention de venir lundi. Cela va entrainer certaines conséquences fâcheuses, à savoir que je compte faire cours vendredi prochain après-midi pour éponger le programme. Cependant, si jamais vos professeurs de langue n’assuraient pas leurs cours pour une raison ou pour une autre, ce serait encore mieux que j’utilise leurs heures. A vous de me tenir informés.

Attention ! je n’ai pas dit que vous n’auriez pas cours lundi à 8 h : il se peut que vous ayiez mathématiques ou SVT. Rester à l’écoute de radio K. Je suis désolé de ces modifications permanentes, mais la naissance ayant environ 8 jours de retard, j’ai eu un peu du mal à prévoir précisément mon emploi du temps.

Sortie botanique

Le mardi 28 juin, l’éminent professeur A. organise une sortie botanique. Celle-ci est OBLIGATOIRE et fait intégralement partie de l’année de BCPST1.

Le lieu de cette sortie n’est pour l’instant pas arrêté, mais il faut prévoir d’y passer la journée (en gros de 9h le matin à 17h le soir), et il n’est pas exclu qu’elle ait lieu en banlieue (accessible par le RER, n’ayez crainte). Monsieur A. réfléchit activement au problème et passe tout son temps libre à visiter les terrains vagues autour de Paris pour choisir celui où les fleurs sont les plus belles.

La journée est évidemment l’occasion d’agapes et de ripailles, et je ne doute pas que, à l’instar de vos prédécesseurs, vous ne vous fassiez un devoir de nous faire partager vos plus belles réussites culinaires : carottes rapées, cake à la carotte, salade de carottes, muffin aux carottes, saucisson aux carottes, terrine de lapin, lapin la moutarde, rognons de lapin, petits foies de lapin, et bien entendu noix de cajou.

Résultats du devoir en temps limité de chimie n°8

Le devoir est décevant, avec une moyenne de 9,4/20. La moyenne est atteinte par 14 copies et 6 copies ont entre 9 et 10 (sur 39 copies en tout).

La chimie organique a été mieux réussie que la cinétique. En gros, le cours sur les alcools est connu et relativement bien maitrisé, malgré son caractère peu aisé. Il y a des progrès dans l’écriture des mécanismes : en gros, les flèches qui symbolisent les « mouvements » d’électrons sont correctes. Il reste bien des copies où les flèches vont d’une lacune à rien du tout, mais cela est marginal dorénavant. Je rappelle pour les derniers distrait qu’une flèche part toujours d’un doublet (éventuellement d’un électron cébibataire) pour arriver à un atome.

La cinétique, en revanche, est indigne. Tout le monde aurait dû avoir la totalité des points des questions 1 à 4, qui ne sont QUE du cours et qui rapportaient déjà un tiers des points. Je concède que la gestion des unités dans l’exploitation des données était un peu casse-pieds.
Les deux parties suivantes n’étaient que des variations sur le même thème : il fallait écrire que la vitesse est celle de l’acte (2), soit v=k2 [ES], et exprimer [ES]. Comme on est en situation de pseudo-équilibre, il est maladroit de parler d’AEQS (mais les calculs menaient au même résultat) ; il suffisait d’écrire la conservation de l’enzyme et d’exprimer tous les termes en fonction de [ES] à l’aide des deux constantes d’équilibre. La dernière partie était dans la même veine.

En vrac, quelques remarques.
– La conservation de l’enzyme n’a pas été écrite correctement par la plupart de celles et ceux qui y ont pensé. Avec l’inhibiteur, l’enzyme peut être soit sous forme libre E, soit sous forme de complexe ES, soit sous forme de complexe EI, et donc [E]0=[E]+[ES]+[EI]. Rien de très mystérieux.
– A la question « Que représente Vm ? », un minimum de justification était attendue. De même, montrer que Km s’identifie la constante de dissociation du complexe nécessite de faire un peu plus que d’écrire l’expression de cette constante. Il faut faire une démonstration.
– Au passage, c’est dommage que trop d’entre vous ait écrit la constante d’association au lieu de la constante de dissociation. La dissociation de ES correspond à l’équilibre ES=E+S, de constante [E][S]/[ES].

Un petit effort encore, s’il vous plait !

PS : la meilleure note est 23/20, et je n’ai pas pu monter plus haut pour que la personne en question n’ait pas plus de 20 de moyenne à ce trimestre (et sans préjuger de la note du dernier devoir, évidemment). Comme quoi, c’était possible.

A propos des sujets de devoir

Certains d’entre vous m’ont signifié samedi leur mécontentement à propos du sujet du devoir. Ils me reprochaient d’avoir posé un problème de catalyse enzymatique avec intervention d’un inhibiteur, alors même qu’il n’y avait pas d’exercice sur ce même thème dans la feuille d’exercices. Sur le coup, je pas trop su quoi répondre, mais à la réflexion, je crois qu’il convient de répréciser un point.

Nous sommes en classe préparatoires, nous ne sommes plus au lycée. Il n’est donc plus question de préparer un examen dont le contenu sera la 192è variante d’un exercice dont vous aurez déjà fait les 191 variantes précédentes. Je n’ai donc pas à mettre dans la feuille d’exercices un exemple de chaque exercice pouvant tomber, pour la très bonne raison que c’est impossible. J’essaie de mettre des exercices variés, recoupant autant de thème que possible, et surtout autant de techniques de résolution que possible. Cela n’empêchera nullement que le jour du concours, le sujet sera original. La seule chose dont nous puissions être certain, c’est que le sujet sera faisable avec les connaissances acquises pendant les 2 années de préparation, mais cela demandera de réfléchir à comment utiliser ces connaissances pour la résolution spécifique du problème posé.

Ceci nous ramène à un point déjà évoqué avec certains tout au long de l’année. L’essentiel n’est pas de refaire jusqu’à les connaitre par coeur les exercices des TD et des feuilles d’exercice. L’essentiel est d’en tirer des ideés et des méthodes réutilisables dans des exercices différents. Ce n’est pas facile, et cela nécessite d’éviter le bachotage, rassurant mais inefficace à long terme.

Dans l’exemple qui nous occupe, l’intervention d’un inhibiteur ne nécessitait que d’adapter le calcul classique. Il fallait exprimer [ES] en fonction de [E]0, de [S] et des constantes, et ceci en utilisant la conservation de l’enzyme et les expressions des constantes d’équilibre (ou l’AEQS si on ne se place pas en situation d’équilibre). Autrement dit, la bonne façon de travailler n’est pas seulement de savoir refaire le cas classique vu en cours (je n’ai pas dit qu’il ne fallait pas savoir le faire), mais de comprendre pourquoi on fait comme ça, et quelle est la nécessité de chaque étape du calcul.

Je ne pense vraiment pas avoir posé un sujet insurmontable, ni en chimie ni en physique.

Encore un livre et sur une centrale nucléaire en perdition

On n’en finit pas de parler d’une centrale nucléaire dont on a quasiment perdu le contrôle, et des retombées radioactives déjà effectives ou futures. Les deux derniers billets de Sylvestre Huet sur son blog sont très intéressants. Le premier traite de ce que représente un sievert, unité qui quantifie les doses radioactives auxquelles sont soumis les individus ; c’est très clair et cela remet en perspective les ordres de grandeur. Le second présente le plan de gestion de la centrale pour les années à venir, tel que proposé par l’opérateur Tepco.

Opérer dans une centrale nucléaire est évidemment une opération nécessitant de grandes précautions. En France, les ouvriers qui le font sont majoritairement des intérimaires qui enchainent CDD sur CDD dans les diverses centrales gérées par EDF. Une polémique est en cours sur la pertinence de confier des tâches aussi dangereuses à des personnels précaires. La Centrale est un court roman d’Elisabeth Filhol qui est pertinemment paru l’année dernière chez P.O.L., dont la narratrice est justement une de ces intérimaires. Sans être un chef d’oeuvre, c’est une excellente plongée dans ce monde très particulier.

Le roman du mois de mai

Le livre du mois de mai est également d’actualité. Japon + nucléaire, ça fait tiltement penser au roman de Masuji Ibuse Pluie noire, paru en 1970 et édité dans la collection blanche chez Gallimard, autour dire chez le nec plus ultra de l’édition française. Le livre est également disponible en format poche, chez folio. Aucun lien n’est possible vers la page du livre sur le site de Gallimard, montrant par là qu’on peut éditer les meilleurs ouvrages et avoir un site internet pathétique.

Pluie noire se déroule en 1950 dans un village proche d’Hiroshima. Yasuko, une jeune fille ayant tout pour plaire, ne trouve pas à se marier parce qu’elle a été atteinte par la pluie noire, une averse d’eau mêlée de poussière fortement radioactive, qui est tombée sur Hiroshima peu après le bombardement atomique. L’oncle de Yasuko entreprend de montrer que Yasuko n’est en rien malade, et bien évidemment elle l’est.

Le livre est écrit avec une sobriété de ton en complet décalage avec la cruauté de la situation de Yasuko, à laquelle se mêlent des souvenirs de la guerre et des épreuves traversées par les soldats japonais.

A mon avis, le film qui en a été tiré est encore meilleur que le livre. Mis en scène par Shohei Imamura, il est d’une intensité dramatique encore plus forte en raison de la présence d’un personnage supplémentaire: un jeune homme habité par ses souvenirs de guerre et à moitié fou, amoureux sans espoir de Yasuko. Peu prolifique, Imamura a tourné 4 films en 15 ans (1983 à 1998), mais 4 excellents films, dont deux ont reçu la palme d’or à Cannes : La Ballade de Narayama, Pluie noire, L’Anguille et Kanzo Sensei, dont je ne peux que vous recommander le visionnage. Mis à part le premier, ces films sont tout à la fois intenses, pudique et jamais dénué d’un humour solide mais très fin (les allusions au lapin fou d’Alice au Pays des merveilles dans Kanzo Sensei sont excellentes).

Le roman du mois d’avril

La petite île italienne de Lampedusa est à la mode dans les media ces temps-ci.

Ca m’a fait penser à Giuseppe Tomasi, duc de Palma et prince de Lampedusa, auteur italien d’un unique mais magistral roman : Le Guépard (dans la langue de Dante : Il Gattopardo), édité au Seuil dans une nouvelle traduction, mais également disponible en collection de poche du Seuil. Tout dépend si vous préférez regarder, sur la couverture, le beau Burt Lancaster dans l’âge mûr ou la magnifique Claudia Cardinale à 20 ans (Note d’avril 2017 : cette édition avec Claudia Cardinale semble ne plus exister).

Le héros du Guépard est le prince Salina, un vieil aristocrate sicilien dont les armes sont un guépard d’où le nom du roman, et vivant au milieu du 19è siècle. Le vieux monde, celui de la noblesse, de ses terres et de ses paysans en quasi servitude, est en train de s’effondrer. C’est, pour l’Italie, le temps de l’unification du pays par Garibaldi, et le début de la domination économique et politique par la bourgeoisie roturière. C’est le même phénomène qui s’est produit en France à la fin du 18è siècle et en Grande Bretagne encore un siècle plus tôt.

Le prince Salina est un noble jusqu’au bout des ongles : de grande culture, astronome et mathématicien amateur, un gentilhomme dans tous les sens du terme. Il méprise profondément la bourgeoisie qui peu à peu prend le pouvoir, constituée de nouveaux riches incultes et arrogants, bouffis d’argent et ne respectant pas les bonnes vieilles valeurs. Mais son neveu Tancrède, aristocrate ruiné, le convainc de se rallier aux garibaldiens, seule façon à ses yeux pour que l’aristocratie conserve ce qui lui reste de puissance, pour que « tout change pour que rien ne change » selon la formule magnifique qu’il emploie pour convaincre son oncle. Et Tancrède, joignant l’utile à l’agréable, épouse la magnifique fille du plus riche bourgeois du patelin.

Giuseppe Tomasi di Lampedusa a largement puisé dans ses propres souvenirs et dans son histoire familiale pour dresser le portrait du prince Salina, inspiré du propre grand-père de l’auteur. Cela donne un ton extrêmement juste au contexte du roman : la campagne sicilienne et ses paysans misérables, les centaines de pièces du palais familial, dont la plupart sont à l’abandon, la personnalité du prince enfin, dont on en peut en définitive qu’admirer la stature. L’antépénultième chapitre, sur la mort du Prince, constitue parmi les meilleures pages que j’ai jamais lues sur une agonie.

Et pour me faire pardonner de n’avoir pas assuré la chronique livre au mois de mars, je vous offre en prime le film éponyme : Le Guépard, de Luchino Visconti, avec dans le rôle du prince Salina Burt Lancaster dans un de ses meilleurs rôles (mais moins beau, je vous l’accorde que dans Les Tueurs, où il avait largement 20 ans de moins, sans compter qu’il y était le partenaire d’Ava Gardner dans la fleur de son âge, mais je m’égare), Alain Delon dans le rôle de Tancrède (Alain Delon jeune, je précise), et Claudia Cardinale renversante (madame Lapin va décidément me tirer les oreilles). Le film est, et c’est quand même suffisamment rare pour être noté, aussi bon que le livre. D’abord, la nature même de l’intrigue historico-politique est parfaitement respectée, l’ambiance sicilienne est criante de vérité, et la mise en scène est tout aussi magistrale que la structure du roman, culminant dans la scène du bal (durant environ 3/4 d’heure), culte chez nombre de cinéphiles. Le film a été très justement récompensé par la palme d’or à Cannes en 1963.
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